Les dérives des jeux Pay-To-Win
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Les dérives des jeux Pay-To-Win

Tout amateur de jeu vidéo a déjà été confronté à pouvoir acheter un item, une arme ou un accessoire sur son jeu favori afin d’avancer plus vite dans son jeu de prédilection.

Depuis plusieurs années, une mode est arrivée qui s’appelle les « loot box ».

Une loot box est un achat présent dans un jeu qui vous permet d’obtenir que ce soit par une monnaie virtuelle ou des euros, un coffre, un objet, un skin, des joueurs, des personnages… de façon totalement aléatoire.

Ce mécanisme existe depuis de nombreuses années, mais depuis un ou deux ans il a été très popularisé par les youtubeurs et streamers jouant à plusieurs jeux vidéo.

Bien souvent, les loot box sont présentes sur des jeux vidéo multijoueurs et les utilisateurs qui ne passent pas la main au portefeuille sont de plus en plus désavantagés.

Au départ, ce genre de loot box étaient présentes afin d’apporter un contenu supplémentaire et additionnel sans forcément donner de l’avantage aux joueurs (skins et emotes bien souvent). Aujourd’hui ce n’est plus le cas, et la personne qui achète beaucoup de loot box sera bien souvent avantagée contre un joueur qui lui, n’en consomme pas !

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Les dérives des jeux Pay-To-Win

La frustration des jeux Pay to win

Les éditeurs de jeux-vidéos ont donc compris que les coffres et autres contenus aléatoires procurant un avantage au joueur étaient de plus en plus prisés !

C’est donc tout naturellement que dans quasiment tous les jeux multijoueurs de 2021, nous avons le droit à ces différentes loot box dans le contenu.

Ça devient même une obligation pour certains éditeurs « free to play » qui jouent la majorité de leurs bénéfices sur ce genre de box.

Il y a cependant un gros problème qui est le fait que tout cela reste un contenu aléatoire ! Il n’y a donc aucune connaissance de probabilité des gains suite à l’achat de la transaction. Ces coffres ou boîtes mystères n’apportent donc en général aucune garantie suite à l’achat. Bien entendu, vous savez ce que vous achetez, mais ce qui est moins sûr, c’est la qualité du contenu de la boîte qui peut vous offrir un avantage considérable sur votre progression ou au contraire, rien du tout.

La récompense aléatoire est donc soumise au hasard, ce qui incite encore plus les utilisateurs à dépenser leur argent pour obtenir ce qu’ils veulent.

Certains jeux prônent l’aspect de Pay To Win (payer pour gagner). Effectivement, sur certains jeux comme FIFA par exemple, plus vous avez de l’argent (obtenu en achetant des packs à contenu aléatoire payant ou non), plus vous pourrez obtenir des joueurs forts qui vous permettront de remporter votre match plus facilement même face à un adversaire plus fort.

Cette situation pousse donc les joueurs à dépenser leur argent afin d’être à égal niveau avec tous leurs adversaires. C’est donc une technique de consommation poussée à l’extrême ou rien n’est contrôlé malheureusement.

FIFA Ultimate Team : l’exemple parfait de l’addiction aux loot-box

Chaque année, FIFA sort son nouvel opus et fait encore et toujours des records de ventes. Mais là ou FIFA réalise ses meilleurs chiffres, ce n’est pas avec la vente de ses jeux non, mais bel et bien avec son mode de jeu favori : Ultimate Team.

Depuis FIFA 09, les joueurs peuvent jouer à un mode de jeu appelé FUT ou encore Fifa Ultimate Team. Le principe de ce mode de jeu est assez simple, réalisez votre équipe de rêve en obtenant des cartes représentant les joueurs (un peu comme le concept de carte panini) avec une note qui représente le niveau (allant de 40 à 99). Vous pouvez également personnaliser votre terrain, votre équipe, vos maillots avec des cartes ITEMS pour avoir votre équipe ULTIME.

Ainsi, vous pouvez faire cohabiter Cristiano Ronaldo, Zidane, Messi, Ronaldinho et Valère Germain dans la même équipe sans aucun problème.

Ce mode de jeu est mis à jour en permanence par l’éditeur de jeu EA Sports et vous pouvez obtenir des joueurs “améliorer” qui réalisent de bonnes performances dans la “vraie vie”. Ainsi, les joueurs ont tout le temps du contenu qui arrive devant leurs yeux quasiment chaque jour voir semaine.

Ainsi, le mode de jeu possède une économie virtuelle qui est très développée. Il existe même des personnes qui ne jouent pas au jeu et utilisent uniquement le jeu vidéo FIFA pour faire des bénéfices en remportant plusieurs centaines d’Euros chaque mois.

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FIFA Ultimate Team : l’exemple parfait de l’addiction aux loot-box

Pour obtenir des joueurs, vous devez l’acheter. Chaque joueur possède un prix qui varie en fonction de plusieurs critères (la date, le niveau du joueur, sa nationalité, son championnat, ses aptitudes…). Pour acheter ce joueur vous devez donc débourser des “crédits”, la monnaie virtuelle du jeu. Pour obtenir des crédits, vous devez soit vendre des joueurs, soit obtenir de l’argent virtuel en fonction de vos performances dans le jeu.

Pour obtenir de nouveaux joueurs sans utiliser vos performances, vous avez également la possibilité d’acheter des “packs” qui sont l’équivalent des pochettes Panini. Vous ne savez pas quel joueur se trouve à l’intérieur, vous n’avez aucune indication. La seule indication que vous avez est la rareté des joueurs se trouvant à l’intérieur ( Bronze pour les joueurs allant de la note 40 à 60, argent pour les joueurs allant de 61 à 74, et or allant de la note 75 à la note 99).

Vous l’aurez compris pour obtenir ces packs vous avez deux solutions, soit acheter un pack avec vos crédits, soit… acheter le pack avec votre propre argent ! Si vous désirez en savoir plus, il existe de nombreux blog fifa par exemple pour en savoir plus sur ce mode de jeu.

Un problème encouragé par les créateurs de contenus

Vous l’aurez compris, FIFA est donc de plus en plus en train de tourner vers un jeu Pay To Win. Cette mode est également plus approfondie depuis que la compétition a pris une place très importante dans le monde compétitif.

Dès la sortie du jeu, vous avez de nombreux Youtubers, Streamer et joueurs professionnels du jeu qui mettent plusieurs milliers d’Euros en “pack opening”.

Pour obtenir les meilleurs joueurs dans le jeu, il faudra avoir de la patience, chose que les joueurs compétitifs du jeu ne peuvent pas se permettre, car les premières compétitions ont lieu rapidement après la sortie du jeu. Ainsi, la seule manière de rivaliser est de payer de très, très nombreux packs afin d’avoir de la chance et d’obtenir les meilleurs joueurs pour leur équipe, ou d’avoir suffisamment d’argent en vendant leurs milliers de joueurs pour l’acheter sur le marché.

Des comportements de jeux encore plus poussés par les vidéos sur YouTube ou certains Youtubers prennent énormément de plaisir à ouvrir pour plus de 2000€ de packs FIFA en quelques heures seulement.

Ainsi, le joueur lambda va se voir lui aussi obligé de mettre des sous dans le jeu, car tout le monde le fait et il ne peut pas rivaliser lors des matchs en ligne, car il n’aura pas une assez forte équipe dès le départ et va abandonner le jeu rapidement.

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Un problème encouragé par les créateurs de contenus

Des mesures timides pour encadrer les points FIFA

Pour lutter contre les problèmes d’addiction, plusieurs pays ont annoncé vouloir créer des mesures pour encadrer le système de Loot-Box de FIFA Ultimate Team. Suite à une pétition ayant réuni 40 000 signatures, la Chambre des Lords britannique (l’équivalent de notre Sénat) a réclamé le passage des loot-boxes sous la législation des jeux de hasard et lancé une grande consultation pour appuyer sa décision. La Belgique et Les Pays-Bas sont allés encore plus loin et ont décidé de bannir les loot-boxes ce qui rend l’achat de points FIFA impossibles pour les citoyens de ces deux pays.

Néanmoins la situation n’évolue pas beaucoup en France qui ne s’implique pas autant que ses voisins. En effet, l’Autorité Nationale des Jeux (ex-ARJEL) ne considère pas encore les loot-boxes de FUT comme des jeux d’argent même si elle reconnaît un risque d’addiction au jeu. L’ARJ considère donc les loot-boxes comme étant un problème de consommation qui relève du domaine de compétence de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes).

Une position frileuse qui aboutit à un statu quo cependant plusieurs voix se sont levées pour protester, à commencer par celle du youtubeur suisse Psyko17. Réunissant une communauté de plus de 800 000 abonnés, le vidéaste a décidé de porter plainte contre les méthodes peu scrupuleuses de l’éditeur américano-canadien. Accompagné de deux avocats, il prend parti pour les joueurs pris dans l’engrenage FUT qui n’ont pas forcément les moyens de dépenser des sommes importantes dans le jeu. M Morand-Lahouazi dénonce ainsi les pratiques frauduleuses d’EA Sports qui n’hésite pas à manipuler le marché des transferts en y injectant des éléments censés être exclusivement dans les packs. L’avocat évoque également les probabilités truquées des pochettes ainsi que la taxe de 5% sur les ventes qui exprime une « volonté de réguler le marché ». Il qualifie donc ces méthodes de « pratique commerciale trompeuse » et même d’« escroquerie et manœuvre frauduleuse qui créent l’illusion pour inciter à la dépense ». En guise de comparaison ces pratiques sont absolument illégales dans le milieu des marchés financiers.

John Charles, un autre youtubeur spécialisé dans le jeu vidéo, raconte avoir reçu plus de 500 témoignages de joueurs pris dans la spirale de l’addiction. Il partage plusieurs histoires qui l’ont bouleversé comme celles de joueurs ayant dépensé des sommes faramineuses sans pour autant pouvoir obtenir d’aide de la part d’EA Sports. Des gens qui perdent du jour au lendemain leurs économies, leurs biens personnels et même leurs mariages. Le youtubeur alerte l’opinion publique en concluant de la manière suivante : « Jouer aux jeux vidéo ne devrait pas être dangereux, on devrait pouvoir prendre du plaisir sans avoir à dépenser tout ce qu’on gagne. »

Une addiction qui touche les plus jeunes

Ce phénomène de loot-boxes est d’autant plus dangereux qu’il s’étend désormais aux mineurs. Friands de jeu vidéo et de football, ils n’ont pas nécessairement le recul nécessaire pour évaluer le danger potentiel des loot-boxes d’Ultimate Team. Certains jeunes addicts vont même jusqu’à subtiliser la carte bancaire de leurs parents pour recharger leur compte FUT en FIFA Points. Comment expliquer qu’un jeu vidéo classifié PEGI3 puisse occasionner de tels drames familiaux ?

EA Sports n’arrange pas son cas et s’est même payé un bad-buzz en promouvant l’achat de points FIFA dans un magazine à destination des enfants britanniques. Le développeur a ainsi présenté des excuses qui se sont avérées être peu convaincantes et qui ternissent un peu plus sa réputation et sa communication. En 2019, un cadre de l’entreprise avait provoqué l’indignation et l’hilarité des membres du Parlement britannique en qualifiant les loot-boxes de « surprises mécaniques éthiques et amusantes ».

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Une addiction qui touche les plus jeunes

Alors quelles sont les solutions pour endiguer et encadrer le phénomène des loot-boxes ? En 2019, Electronic Arts s’est attiré les foudres de la communauté de Star Wars Battlefront II. En effet, les joueurs se sont indignés de devoir passer à la caisse pour débloquer des personnages et des accessoires. Sans cela, les joueurs de Battlefront II sont obligés de passer des milliers d’heures de jeu pour obtenir tout le contenu du jeu, créant ainsi un déséquilibre avec ceux ayant fait le choix d’utiliser la carte bleue. La communauté de Battlefront II a rapidement réagi en protestant massivement sur les réseaux sociaux et sites spécialisés. Face à cette tempête médiatique, EA a cédé et retiré le système de transactions financières de Star Wars Battlefront II.

Les motifs d’espoir pour FIFA Ultimate Team

L’exemple de Star Wars Batllefront II est un motif d’espoir pour les fans de FUT même si la bataille est loin d’être gagnée. Malgré ses défauts évidents et ses pratiques commerciales peu scrupuleuses, FIFA n’en reste pas moins l’un des biens culturels les plus appréciés en France. De plus, il est en situation de quasi-monopole et ne possède pas de concurrence sérieuse. Autrefois apprécié par un grand nombre de joueurs, PES est peu à peu tombé dans l’oubli et ne fait plus le poids face à FIFA. L’année 2021 aura même été fatale pour la licence de Konami qui a abandonné son nom et son identité pour devenir e-football. Les joueurs n’ont donc pas d’autres alternatives et sont contraints d’acheter à nouveau FIFA tous les ans en septembre.

Autre problème de taille, la communauté de FIFA est loin d’être aussi soudée que celle de Battlefront II. FIFA Ultimate Team étant massivement orienté vers la compétition, les joueurs sont constamment mis en opposition afin de gagner les meilleures récompenses possible. Une situation qui n’incite pas à la cohésion et à la rébellion contre l’éditeur canadien. Pire encore, cette compétitivité exacerbée débouche souvent sur des comportements inappropriés et toxiques, comme des menaces en privé et des insultes à caractère raciste. Pourtant engagé dans la lutte contre les discriminations, EA Sports n’a jamais pris de mesures radicales contre les auteurs de ces propos inappropriés.

Mais malgré tous ces obstacles, les coups de pression commencent à arriver. Le joueur professionnel de Schalke 04 Tim Latza a ainsi déclaré ne plus vouloir injecter de points FIFA en début de jeu, arguant que les performances du jeu ne dépendent pas du solde bancaire. Le youtubeur français Robert87000 (427 000 abonnés) lui emboîte le pas et bannit désormais l’usage des microtransactions dans son contenu. Des mesures-chocs qui pourraient bien servir de prévention et d’exemple pour les spectateurs.

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Robert87000

Enfin, l’éditeur inconnu Strikerz a annoncé en août dernier l’arrivée d’un nouveau venu dans les simulations vidéoludiques de football : UFL. En cours de développement de 2016, le jeu s’est dévoilé lors de la très célèbre et attendue Gamescon. Mettant l’accent sur le multijoueur, UFL veut concurrencer e-football et FIFA durant les prochaines années. Pour réussir ce tour de force, Strikerz a déclaré vouloir rendre le jeu entièrement gratuit y compris lors de l’ajout de nouvelles fonctionnalités. Si le jeu parvient à se montrer intéressant, il pourrait très vite devenir une menace sérieuse pour la licence FIFA.

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